« Par la grâce d’Allah SWT, après plus de trois mois d’absence, me revoici, parmi vous, en pleine possession de mes capacités physiques et intellectuelles. Gloire au Tout Puissant, le Tout Miséricordieux ! Je voudrais, en ce moment empreint de solennité, remercier du fond du cœur, l’ensemble de nos compatriotes, de l’intérieur et de la diaspora, ainsi que tous les panafricains. Des plus petits hameaux aux plus grandes agglomérations, me sont parvenues, des mosquées, des églises et des temples, les prières et les invocations des compatriotes anonymes et des serviteurs du culte. Nos concitoyens dans leur écrasante majorité, parents, amis, sympathisants et même rivaux politiques les plus farouches ont tenu à m’exprimer leur compassion et un bon retour parmi les miens. A toutes et à tous je dis : grand merci ! ». C’est par ce message de reconnaissance que le chef du gouvernement a donné des signaux positifs pour son possible retour à la tête de la Primature.
Un retour triomphal et opportun, selon certains, mais plein de scepticisme, selon d’autres. En tout cas, Choguel revient au moment où la transition vit des moments difficiles. Si ce retour se confirme, Choguel va davantage se frotter aux multiples problèmes qu’il connaît déjà ou qu’il a vus naître pendant qu’il était sous traitement.
Déjà, ce retour coïncide avec la reprise du front social avec les différents préavis de grèves des syndicats en gestation. D’abord, le bal a été déjà ouvert par l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) qui a déserté les classes pendant au moins 72 heures et promet de revenir à la charge si rien n’est fait dans les prochains jours. « Cela fait deux ans maintenant que nous avançons les mêmes problèmes au niveau de notre ministère de tutelle, des engagements ont été pris qui n’ont pas été honorés. Pendant deux ans, nous avons écouté et dialogué, nous avons annulé nos mots d’ordre de grève, mais nous voyons que la ligne ne bouge pas », a expliqué Mamadou Maïga, porte-parole de l’AEEM.
Les étudiants se plaignent du retard accru dans les paiements des allocations financières ; du mauvais état des infrastructures ; de l’absence de connexion internet ; de l’insécurité ; des classes surpeuplées ; du manque de professeurs : une vingtaine de revendications aussi précises que diverses justifient, selon les leaders de l’Association des élèves et étudiants du Mali, ce mot d’ordre qui pourrait surgir à tout moment.
Les enseignants signataires du 15 octobre 2016, qui avaient suspendu leurs revendications en raison de la situation socio-politique et économique du pays, se redressent également autour de leur fameux article 39 et menacent d’aller en grève. L’application de cette disposition qui a toujours été déplacée d’un régime à un autre, attend aussi Choguel. Là également, ce dossier ne lui est pas du tout étranger, puisqu’il en avait fait un instrument de combat au sein du M5-RFP.
Grève des magistrats inévitable ?
Dans un communiqué conjoint rendu public le 28 novembre 2022, le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA) appellent leurs preux militants à observer un arrêt de travail de 05 jours allant du 29 novembre au 05 décembre 2022 sur toute l’étendue du territoire national, reconductible au besoin. Ils appellent, en outre, au boycott de toutes les activités organisées par la Cour Suprême y compris la rentrée judiciaire 2022-2023 projetée. Selon eux, l’entreprise néfaste ourdie contre le corps doit être combattue sans répits possibles.
« Le retrait du projet de loi portant modification de la Loi n ° 2016-046 du 23 septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation , les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle , pour : violation de la Loi La loi 2002-054 du 16 décembre 2002 portant statut de la magistrature en ses articles 100 et 101 ; atteinte à l’indépendance de la magistrature ; violation du caractère impersonnel de la loi ; La loi 2002-054 du 16 décembre 2002 portants statuts de la magistrature dont la relecture est réclamée depuis sept ( 07 ) ans et enfin le classement des juridictions réclamé sans succès depuis des années», peut-on lire dans ledit communiqué.
Ce qui est sûr, ce front social en ébullition s’explique par la maladresse du gouvernement à augmenter le budget de l’État, notamment à travers le Conseil national de Transition où les membres passent de 121 à 147 pour un budget qui passe de 9 milliards à 12 milliards. Idem pour le budget de la présidence qui passera de 18 milliards à 23 milliards en 2023.
C’est donc un retour à coup de défi qui attend le Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, sur le plan politique. Certes, il est présenté comme un stratège, mais les réalités actuelles du pays pourraient être un fardeau de trop pour un homme visiblement fragilisé. On n’en est pas encore là certes, mais les précautions sont de mise.
Amadou Kodio
Source : Ziré